Un émoji de biscuit fait référence au four, et donc au four crématoire. Un dessin de douche
évoque les chambres à gaz des camps de la mort déguisées en salles de bains. Deux éclairs
imitent le sigle des SS, organisateurs et exécutants de la Shoah. Un pictogramme de petit
peintre avec ses pinceaux, et voici Hitler, artiste raté de Vienne. Les initiales TJD (Total
Jewish Death) souhaitent en fait un nouveau génocide.
Voilà le genre de détournement symbolique et de messages codés qui foisonnent maintenant en ligne pour permettre aux antisémites de faire circuler leurs messages nauséabonds
à l’abri des censeurs. En français, le procédé rhétorique s’appelle dilogie. En anglais, on dit
dog whistle, en référence à un sifflet audible seulement par l’ouïe fine des chiens.
Les émojis du bréviaire numérique de la haine ont été exposés et décortiqués par la chercheuse universitaire Katharina Soemer jeudi matin au Musée de l’Holocauste à Montréal.
Sa présentation portait sur l’antisémitisme en ligne. Mme Soemer dirige le laboratoire
Social Media & Hate de l’Institute for the Study of Contemporary Antisemitism de l’Université de l’Indiana.
« L’antisémitisme est constant sur les réseaux sociaux comme c’est une constante dans la
société. En même temps, l’antisémitisme en ligne est stimulé par les événements [sociaux
politiques], a résumé Mme Soemer. En plus, les médias sociaux changent très rapidement,
et les symboles qu’ils utilisent aussi. »
La présentation de la spécialiste a attiré environ 80 personnes, surtout des femmes, certaines venant d’autres provinces. Les trois journées de séminaire du musée se terminent
vendredi. Elles fournissent des outils pour enseigner la Shoah et pour combattre l’antisémitisme dans les mondes réel et virtuel, là où les jeunes se trouvent en masse. La conférence a d’ailleurs montré des images d’une influenceuse se maquillant en ligne tout en
livrant un hommage au Hamas... Source